Les tiers-lieux une alternative ou une 3ème voie ?

Actes du colloques du 5 octobre 2018

Nathanaël MATHIEU
Président et fondateur de Neo-Nomade

Le terme de tiers-lieux a été imaginé il y a plus de 30 ans par un sociologue américain. Il recouvrait les lieux de socialisation, situés entre le domicile et le bureau tels que le café français ou le pub anglais, qui du fait de l’essor de l’automobile, étaient en train de disparaitre.

Avec le numérique, de nouvelles formes d’espaces partagés ont émergé. Les plus connues sont les espaces de co-working qui regroupaient des indépendants et où sont désormais installées des start-up. S’ajoutent des espaces de fabrication comme les fablab, les haker spaces et les lieux de sociabilisation comme les cafés solidaires.

En France on compte environ 1400 tiers-lieux. Ces espaces traduisent un état d’esprit qui rebat les cartes sur la manière dont on travaille. Travailler dans un tiers-lieu est un choix, pour retrouver une communauté, rompre l’isolement ou encore accéder à des compétences ou à des ressources. Les lieux de co-working sont aujourd’hui devenus un marché avec une logique économique alors que les tiers-lieux privilégient une logique d’économie collaborative.

Un nombre croissant d’entreprises estime que le télétravail ne se situe pas uniquement au domicile mais aussi dans des tiers-lieux. Ces derniers apportent des réponses à des problématiques telles que le transport, l’attractivité d’un territoire ou encore une possibilité d’ajustement immobilière. Au-delà, leur plus forte valeur ajoutée est celle des compétences, nombre d’entreprises intégrant ces lieux pour échanger et réaliser des projets avec des personnes extérieures à l’organisation. Trop d’organisations considèrent encore les tiers-lieux comme des dépenses supplémentaires alors que ce sujet porte une réflexion plus globale sur le travail.

Il est donc particulièrement intéressant de regarder ces lieux comme une source d’inspiration sur les nouvelles formes de travail. Côtoyer des personnes ayant des activités différentes des siennes permet de redonner du sens à ses missions et de les faire évoluer. Travailler dans des tiers-lieux permet d’envisager ses activités sous un autre angle. Ce sont les laboratoires du travail de demain.

Martine BORDONNE
Directrice de projets, Orange

Le télétravail s’est considérablement développé en cinq ans passant de 700 à 24 000 télétravailleurs sur un total de 90 000 collaborateurs. Orange est confrontée également à l’émergence du nomadisme « anay time, any where and any device ». En s’équipant d’un outil de mobilité, les agents se libèrent du poste de travail et échappent à l’unité de temps et de lieux. Les RH accompagnent aujourd’hui un changement radical de la manière dont est exercée et managée l’activité. Les collaborateurs sont en demande de confiance et d’autonomie.

Les 60 000 nomades que compte Orange attendent qu’elle les accompagne en proposant des outils qui les aide à trouver l’espace et la connectique pour réaliser un travail de qualité. L’espace se vide progressivement avec pour conséquence l’isolement et la baisse du collectif. Compte tenu du nombre de départs, du développement du nomadisme et de la mise en place d’espaces dynamiques, une réflexion est en cours sur le corpo-working. Les équipes de recherche analysent actuellement les usages des nomades : les sites les plus demandés, les flux etc. Les espaces sont désormais aménagés pour accueillir les différentes catégories de nomades dont les télétravailleurs. Une application spécifique permet de repérer les lieux de travail disponibles et de rencontrer des collègues. Pour être innovant, il faut se laisser guider par les rencontres. De ce fait, l’espace devient une formidable opportunité d’échanges.