Face au risque de perte de compétences, quelle politique de développement des compétences ?

Actes du colloque du 6 octobre 2017

Yves ARNAUDO
DRH adjoint du Groupe La Poste,
en charge de développement RH

Jean-Baptiste NICOLAS
DRH ville de Paris

Yves ARNAUDO :
Le groupe La Poste, 260 000 collaborateurs dont 70 000 facteurs, est une entreprise en forte transformation. Notre risque n’est pas tant le « trou » de compétences que l’inadéquation des ressources. Nous ne savons pas encore quelle sera La Poste de demain et l’on y travaille avec chacune de nos branches et de nos filières. Le rôle de la DRH doit être plus marqué dans l’accompagnement des managers, notamment parce qu’ils n’y voient pas très clair sur l’évolution des métiers de demain et leurs besoins en compétences. Une démarche GPEC est en cours avec les patrons des activités. Notre risque est de ne pas identifier suffisamment vite les compétences car l’enjeu de formation est colossal pour les collaborateurs. Les transformations seront encore plus fortes dans les années à venir en intégrant les impacts de l’intelligence artificielle, de la robotisation et du digital

La GPEC a une connotation un peu techno mais on a le sentiment d’une évolution importante des managers sur ce sujet car ils en ont vraiment besoin. Un accord a été signé avec les partenaires sociaux « un avenir pour chaque postier ». La 1ère brique est un accord de GPEC avec un observatoire des métiers. La GPEC devient intéressante si les porteurs de ce sujet sont les managers et non plus les RH qui aident en termes de méthode. La compétence devient cruciale dans la réussite du business. La dimension qualitative de la GPEC prend le pas sur la dimension quantitative pour une meilleure adéquation besoins/ressources.

Le digital learning est une opportunité. Cela permet de diversifier, d’accéder à des formats ludiques et de mixer les dispositifs dans une logique de parcours. Il s’agit de sortir du prescrit pour donner accès en libre-service à distance même sans validation du manager. La capacité de transformation des postiers par la formation en lien avec les nouvelles technologies est une des réussites du groupe La Poste. Les 75 000 facteurs ont des compétences insoupçonnées : Simplon a accompagné la transformation de certains en Web développeurs. Lors de la sélection de la 4ème promotion, 500 postiers ont posé leur candidature ce qui traduit leur espoir en la formation et leur volonté de changement.

Jean-Baptiste NICOLAS :

Paris est une ville et un département qui comptent 55 000 agents avec des métiers très diversifiés. La perte de compétences n’est pas notre enjeu. Faire évoluer les compétences pour une adaptation aux évolutions technologiques est, en revanche, potentiellement un enjeu fort. Les robots sont là, nous devons apprendre à les utiliser. Nous sommes face à la nécessité de reconvertir les agents en très grand nombre afin de répondre à un besoin d’évolution des compétences très important.

A Paris, le souhait est de reprendre la main sur la formation en passant d’une logique de catalogue à une logique prescriptive plus directive concernant les compétences qui doivent être acquises. Dès le début de la carrière, la collectivité incite les agents à réfléchir et à se former pour anticiper les évolutions. La DRH propose des programmes qui débouchent sur l’obtention d’un diplôme. Elle encourage les agents à obtenir des qualifications qui ont une valeur sur le marché du travail. Une réflexion sur les formats est en cours, la durée des formations étant très longue : 2 à 5 jours et les contenus parfois indigestes. Une école des RH a été créée pour former les gestionnaires RH. Des formations, parfois très courtes, sont proposées aux cadres qui se forment « comme on joue à candy crush dans le métro ».

Un large panel de dispositifs est disponible à Paris. L’innovation en matière de formation ne procédera pas du numérique mais plutôt d’une réflexion sur la manière dont on forme, l’interactivité des échanges, la qualité des supports et des formats. Le numérique peut aider mais n’est pas le cœur du sujet. L’engagement de l’agent dans sa formation est primordial.

Interventions & questions
Yves ARNAUDO et Jean-Baptiste NICOLAS

Un des participants insiste sur la nécessité de renouveler l’engagement en passant par la capacité d’une organisation à offrir des perspectives d’évolution avec l’association de managers impliqués dans le développement des compétences de leurs collaborateurs.Selon Yves Arnaudo se projeter dans l’avenir est une source d’engagement. Nous devons effectivement associer les managers au développement des compétences. L’engagement repart quand on redonne des perspectives. L’accord « un avenir pour chaque postier » propose des parcours qualifiants, 70 heures de formation, qui aboutissent à une certification et donne droit à une prime de qualification.Jean-Baptiste Nicolas ajoute que la ville de Paris est impliquée dans la création d’écoles proposant des parcours métiers. Quelle gestion des hauts potentiels ?Selon Yves Arnaudo, le haut potentiel est quelqu’un en capacité d’accéder à un haut niveau de poste. Des process spécifiques permettent de les identifier et de les former. Le groupe La Poste et 5 grands groupes réunissent leurs hauts potentiels lors de programmes de formation et d’échanges pour développer leur ouverture d’esprit, leur culture et leur dimension stratégique.